Certaines carrières de pierre à bâtir sont réutilisées pour la culture du champignon et certaines sont toujours en activité. C’est le cas de la champignonnière des Alouettes à Carrières-sur-Seine. Voici une visite de ce lieu dédié à la culture du champignon depuis plusieurs décennies.
De l’extraction de pierre à la culture du champignon
Avec un sous-sol très riche en matériaux pour la construction comme le calcaire et le gypse, on exploite en surface puis en souterrain pendant plusieurs siècles, à Paris et en Ile-de-France.
Si certaines carrières sont toujours exploitées, la plupart sont abandonnées.
L’histoire du champignon de Paris commence en 1814 quand un maraicher nommé Chambry, décide de visiter les anciennes carrières près du terrain qu’il exploite rue de la Santé. Le puits d’accès aux souterrains était pourvu de crottin de cheval qui est l’élément indispensable à la culture du champignon. Chambry découvre alors la présence de champignons et décide de consacrer son temps à sa culture.
Fort de son succès, la culture du champignon s’étend aux carrières avoisinantes. Lieux idéaux par leur température constante et avec un taux d’humidité élevé, ces espaces vides sont propices à la pousse des champignons.
Au XXe siècle des champignonnistes originaires d’Italie, s’installe dans les carrières de la banlieue parisienne pour y cultiver le champignon de Paris. C’est d’une de ses familles qu’est issue la carrière des Alouettes.
Les différentes méthodes de culture
Au départ les champignons étaient cultivés à partir de grandes lignes de meule de fumier de cheval. Quand la culture devient plus intensive, la présence de bactéries mis à mal les cultures. Une désinfection de l’espace était nécessaire. De la chaux était alors mise sur les murs et le sol.
Dans les années 1960, on change alors de méthode pour privilégier la culture en sac et d’isoler les différentes cultures afin d’éviter les éventuelles contaminations.
Désormais la culture se fait sur de grands racks composés de fumier de cheval dans lequel est ensemencé le mycélium. Une couche de calcaire recouvre le dessus.
Une carrière chargée d’histoire
La cavité souterraine est décomposée en plusieurs zones :
La Plaine, Le Petit Bois, les Alouettes et une dernière partie appartenant à la Marine, la base du Commandant Millé.
La carrière dite Le Petit Bois sert de champignonnière mais ferma en 2005. C’est la famille Spinelli qui utilise le lieu. Bien qu’abandonnée depuis il reste des traces toujours visibles de la culture des champignons. La champignonnière des Alouettes, juste à côté, est détenue aussi par la famille Spinelli. Toujours en activité et présentée ici faits environ 15 000m².
Collée à la base de la Marine du Commandant Millé, Elle a été utilisée pendant la Seconde Guerre Mondiale par les allemands afin de fabriquer des torpilles. En effet en 1939, le Ministère de l’Air prend possession du site dit du Commandant Millé pour en faire une usine de moteurs d’avions Hispano-Suiza. En 1940, la Kriegsmarine réquisitionne le site pour y produire les torpilles prévues pour la flotte des U-Boote de l’Atlantique.
La champignonnière des Alouettes garde des traces de cette période de l’Histoire. On peut remarquer qu’elle a été renforcée comment on peut le remarquer dans les abris de défense passive.
Culture du champignon locale et familiale
Les racks de culture arrivent déjà prêts à la carrière des Alouettes et il faudra 4 semaines pour commencer à voir sortir les champignons.
Dans cette carrière on produit des champignons blancs et rosés. En tout, les racks vont produire 3 à 4 fournées de champignons avant d’être sortis car devenus inutiles.
Les racks sont répartis dans différents espaces, séparés par des bâches de plastique afin de garder la chaleur. Une chaudière maintient la température de la champignonnière à environ 16 degrés.
Le métier de champignonniste va consister à l’arrosage des cultures et la ventilation les salles afin d’avoir un rendu optimal. En dernier lieu nous arrivons tout au fond de la carrière pour découvrir « la neige » : les racks de champignons constituent une forêt blanche impressionnante.
Les employés de la carrière s’attellent à la cueillette, ils mettent les champignons dans des petites barquettes bleues, stockées ensuite dans des cagettes. Direction la chambre froide afin de subir un choc thermique nécessaire avant le filmage. Cela permet de garder un champignon ferme et d’avoir une meilleure conservation.
Amour du métier et filière locale
Pour moi il était important de vous partager cette visite. On ne regarde pas toujours d’où proviennent les produits que nous consommons et nous pouvons acheter des produits certes peu chers mais qui font énormément de kilomètres, alors que nous avons parfois près de chez nous un produit de qualité, certes un petit peu plus cher mais qui soutient le commerce local. Qui soutient des personnes passionnées par leur métier et qui aiment ce qu’elles font.
C’est le cas pour cette champignonnière. Monsieur Spinelli est parti à la retraite et a cédé le lieu à un de ces employés afin de faire perdurer le projet de toute une vie et aussi la filière pour la coopérative dont ils dépendent. Monsieur V. me parle de sa vie, comment il est tombé amoureux de la champignonnière quand il est venu y travailler. Il a quitté un métier plus rémunérateur mais avec moins de sens pour le métier de champignonniste.
Durant notre visite, on rencontre des personnes qui viennent acheter des champignons : des commerces locaux. C’est ainsi qu’un monsieur arrive à l’entrée de la carrière avec son scooter aux couleurs d’une pizzeria du coin pour retirer sa commande.
Nous-mêmes, adorateurs de champignons, nous repartirons avec quelques caisses pour se délecter de se met issus des souterrains voisins.